Il ne savait pas vraiment qu'est-ce qu'on commémorait ce soir. Tout ce qu'il savait, lui, c'est qu'il s'était glissé dans une des fêtes organisées par les plus grands du Capitole, dans une salle de réception somptueuse où étaient accrochés des milliards de froufrous et d'objets. La raison de sa présence ici ? Sûrement pas ce que les quadragénaires venaient commémorer. Mais il n'était pas le seul à ignorer la raison superficielle de la fête, car dans l'immense (vraiment très immense) salle, on retrouvait énormément de jeunes de son âge, un verre à la main, accoudés contre un quelque part, à la recherche d'un quelqu'un avec qui passer la soirée. Ou la nuit. Ou peut-être même la vie, mais Arès doutait fortement du dernier point. Lui, il venait s'amuser. Boire. Draguer, si jamais il arrivait à trouver.
Mais en attendant, Arès buvait, se fondant dans l'immense foule. Elles étaient belles, les fêtes du Capitole. Elles l'avaient toujours été, et elles comptaient bien le rester. Le Capitole, pour monter sa supériorité, avait toujours su s'affirmer, que ce soit en enfermant des jeunes dans un endroit confiné et dangereux ou bien en organisant les plus belles fêtes que la Terre n'eut jamais porté.
Mais en attendant, Arès ruminait. Il avait toujours aimé venir ici, venir s'éclater. Il avait l'impression d'évoluer dans la société. Certes, il adorait se sentir supérieur aux autres dans le District, mais ici, il se sentait dans son élément. Comme un poisson dans l'eau. Comme un Arès parmi les autres dieux. N'empêche qu'aujourd'hui, il ne pouvait s'empêcher de penser aux gamins enfermés dans le Labyrinthe. Ophélia s'y trouvait. Que faisait-elle, à cette heure ici ? Son amie avait admit que cela ne la dérangeait pas de partir, mais ses frères devaient lui manquer. Et elle manquait à ses frères. Et elle manquait à Arès, qui avait peur de ne plus jamais la revoir. Puis, il avait peur pour lui, aussi. Peur de se retrouver au Bloc, comme tous les autres. Il avait toujours voulu vivre comme un prince, mais le Labyrinthe avait mis un coup à ses idéaux. Il n'était pas protégé. Pas plus que les autres. Il était terrifié pour sa sœur, aussi. Sa sœur jumelle, sa moitié. S'ils l'attachaient de lui, il les tuerait. Tant pis si c'était le Capitole, tant pis si c'était le pouvoir et qu'il crèverait sous les coups, personne ne lui enlèverait sa sœur jumelle. Alors Arès ruminait en silence, parce que pour la première fois de sa vie, non seulement il avait peur, mais il se trouvait au milieu des personnes qui pouvaient décider de son sort.
Et, sur cette pensée franchement pas rassurante, il prit une gorgée de son verre. Puis une autre. Sa gorge le brûla, et il sourit en expirant. En se rappelant qu'il aurait bientôt atteint l'âge tant attendu. Une autre gorgée, pour oublier Uriah. Puis soudain, allez savoir pourquoi, il tourna la tête, et il la vit. Gia. La jolie Gia, la tatoueuse, qui semblait parfois plus qu exaspérée par son sarcasme permanent mais qui restait une des personnes qu'il appréciait le plus ici. Il prit le temps de remplir son verre et se dirigea vers elle, un petit sourire sur le visage. Il fallait oublier les problèmes, les laisser se faner et se dissiper. Sinon, il n'aurait jamais plu le temps de vivre.